Nous voilà donc partis pour cette aventure. Cela fait plusieurs années que je désirais partager une sorte de carnet nomade autour de la musique. Ce projet d’écriture en chemin est progressivement devenu celui d’un album. Je vais donc tenter de vous raconter un peu ici le pourquoi et le comment.
Il y a quelque temps de ça alors que je cheminais dans un petit train qui filait dans la campagne sur l’île de Kyushu, au sud du Japon, je voyais autour de moi le flanc des montagnes recouvertes de forêts se dessiner dans la lumière. Dans cette lumière elles étaient bleues. J’ai alors distinctement entendu dans ma tête ces mots : « Les Montagnes Bleues ». Alors j’ai pensé à écrire une chanson qui aurait ce nom, une chanson qui aurait parlé de forêts, de brumes, d’eau, de nuages qui dansent, qui aurait évoqué cette atmosphère de doux mystère bienfaisant que l’on peut sentir dans la nature. J’ai fait plusieurs tentatives, réalisé plusieurs ébauches, mais je n’ai rien terminé. Mais ces mots eux sont restés, et ce jusqu’à ce que je comprenne qu’ils seraient le nom du projet d’écriture en chemin d’un album à l’écoute des eaux, des arbres, des montagnes, des oiseaux, des fleurs, ou tout du moins que son écriture se ferait dans une relation de proximité avec la nature et de ceux qui y vivent.
Ce projet est donc un projet qui me ressemble puisque je passe beaucoup de temps dans la nature, que nombre de mes chansons témoignent déjà de cela, et que j’écris souvent en voyage. Évidemment, tenter de suivre le fil de ce lien avec la nature, en cette période si particulière que nous traversons, n’a rien d’un hasard, vous vous en doutez.
Ce projet, c’est donc une continuité dans mon travail même si la manière de l’envisager est un peu différente. Car il s’agit aussi de susciter des processus d’écriture en chemin, notamment lors de résidences de création prévues dans plusieurs pays, et aussi de proposer des collaborations à des amis artistes qui ont un lien fort avec la nature. Des collaborations musicales évidemment, mais aussi des collaborations avec des plasticiens, qui vont illustrer ce projet au fil de son parcours.
Je ne sais pas ce qui émergera de cette aventure, nous verrons bien. Comme le dit si bien Dick Annegarn, la chanson c’est comme un poème chinois, c’est un minimum complet. Je suis bien d’accord avec ça et je sais simplement que pour ce minimum complet je ne transigerais en rien.
Vous découvrirez donc sur ce blog des chansons écrites en chemin, des ébauches, ainsi que des cartographies poétiques, sonores et visuelles des lieux que nous traverserons, des portraits, etc … Vous découvrirez aussi cette année « Hirondelle », un E.P de 4 titres, quatre chansons que j’aime beaucoup, que j’ai écris ces deux dernières années, et qui sont directement reliés à l’énergie de ce projet. Il y a là une grande envie de revenir vers vous et de continuer à cheminer en semant de bonnes graines, en partageant régulièrement, après ces mois pendant lesquels je suis resté en silence radio à nourrir cette vision des chemins de l’écriture de cet album.
Pour ce travail je serais en bonne partie accompagné par Yoko Takeda, que vous qui me lisez ici connaissent bien, qui m’accompagne au violon et sur mes différents projets depuis plusieurs années déjà, qui gère toute la logistique d’organisation au Japon et qui m’aide beaucoup par ailleurs.
Pour en revenir à ces mots « Les Montagnes Bleues », ce terme est correct au Japon, puisque le vert, et celui de la nature en particulier, est souvent écrit avec l’idéogramme « Ao » qui désigne aussi bien la couleur verte que la couleur bleue. Dans le texte « Sansuikyo », «Montagnes et Rivières comme Sutra » du grand maître Zen japonais Dogen, les Montagnes Bleues sont évoquées et il est entendu que la nature enseigne la vraie loi de l’univers.
Le bleu c’est bien évidemment la couleur du ciel, de l’espoir vibrant. La note bleue, elle, est cette note magique entre les notes.