À Nara, dans la capitale des gentils chevreuils, où l’on peu déambuler dans la joie et la tranquillité sous les arbres, s’il y a un lieu où l’on sait accueillir et s’amuser c’est bien au Ryokan Matsumae. Ce lieu situé dans la ville ancienne, initialement dédié à l’accueil des touristes dans le style pension de famille traditionnelle, où l’on pratique notamment la calligraphie, le Kyogen et le Yoga, est en train de vivre sa progressive reconversion d’après Covid et nous participons à cette transition. Il est bien possible que dans quelques temps ce lieu devienne une résidence d’artistes et nous sommes les premiers à initier ce mouvement. Notre ami Tohkei Naomi-san, la maîtresse de cette maison, artiste calligraphe de talent, a à cœur d’aller de l’avant et de savoir changer si nécessaire. Nous lui souhaitons tout le meilleur pour que les choses se passent en souplesse et aillent là où elles doivent aller. Et puis il est vrai aussi qu’il devient un peu dur pour elle et aussi pour Fuwa-san, que nous appelons affectivement « Fuwa-rin » (celui qui papillonne), seconde main de la maison, d’être dans cette attente indéfinie d’une clientèle qui a quasiment déserté la ville depuis le Covid, tant ceux deux là aiment leur travail. Peut-être Fuwa-san pourrait-il en profiter lui aussi, maintenant qu’il a plus d’énergie disponible, pour aller un peu plus vers les arts, ceux visuels, en continuant à filmer les chevreuils de la ville, et aussi les artistes de passage, lui qui a si bien su nous filmer lors de la session « Le Papillon et l’Aubier » que nous avons réalisée ici.
Il était prévu que Naomi-san réalise deux œuvres lors de cette session en mode « performance », pour les personnes ayant choisi cette contrepartie au financement participatif du projet. Après la tonalité tout en clair-obscur de « Le Papillon et l’Aubier » peut être nous fallait-il aller vers plus ludique ? C’est en tout cas ce que nous avons fait. La thématique initiale pour cette improvisation était les cernes d’arbres mais il y avait aussi l’idée des cimes.
Le kanji 輪 « RIN » que l’on voit ici signifie « roue » et par dérivé le cercle, les cycles. On retrouve ce kanji dans le mot qui désigne les cernes de l’arbre 年輪 (NEN-RIN), qui est donc complété ici par le kanji 年 « NEN » qui signifie « année ». Tohkei Naomi-san nous a rappelé que ça n’est pas avec l’aubier que l’on construit des choses bien solides mais avec le bois de cœur. Dans le même temps elle nous a aussi montré que la forme d’une partie du kanji 輪 « RIN » représente des plaquettes de bois les unes sur les autres, maintenues par un fil enroulé, sur lesquelles étaient écrites il y a bien longtemps les choses importantes, celles dont on devait impérativement se rappeler. Elle disait que peut-être nous sommes de l’aubier, mais que, comme l’énergie présente sur ces planchettes qui avaient aussi vocation à traverser le temps, il y a en nous cette même nécessité forte d’écrire quelque chose, de transmettre.
L’aubier… ne devient-il pas, cercle après cercle, petit à petit, le bois de cœur ?
Tohkei Naomi Yanï : calligraphie. Ludovic B.A : chant. Yöko Takeda : violon. Steve Eto : percussions